En février et mars dernier, de très grosses quantités d’héroïne très pure à 97 % (4^ème degré, qui permet la vente du « one way ticket » ou billet d’aller simple parce qu’il produit une dépendance immédiate et un risque non contrôlable d’overdose, bien plus dangereuse que celle en provenance du sud-est asiatique diffusée sur le marché américain, raffinée seulement à 50 ou 60 % et considérée du 3^ème degré) sont arrivées sur le marché européen, en provenance de l’Afghanistan. En 2003 les aires cultivées en pavot sont passées à 80.000 hectares, alors qu’elles n’étaient que de 30.500 hectares en 2002. La récolte entre mai et juillet dépassera les 4.900 tonnes d’opiacés à incision, équivalant à 490 tonnes d’héroïne pure qui finira, elle aussi, sur le marché européen. Les quelques envoyés spéciaux de guerres restés dans le pays ont raconté, après avoir survolé en hélicoptères des régions comme Helmand, Kandahar, Ouruzgan et Nangarhar, qu’un « immense printemps rose » a allumé le paysage national de couleurs entre l’ivoire et le violet-rose. Ce sont là, justement, les immenses extensions de « papaver sonniferum », dont la floraison luxuriante a été favorisée par les pluies tardives du mois de févier.

James Wolfensonh, le président de la Banque mondiale, a déjà lancé deux cris d’alarme, face à une communauté internationale qui ferme les yeux sur une facturation de la « matière première » pour une somme d’un milliard 400 millions de dollars, c’est-à-dire 200 millions de plus que toute l’aide fournie ou promise à l’Afghanistan, et reste sourde à sa requête d’une contribution de 600 millions de dollars d’aides aux cultures de substitution en Afghanistan. En plus, suite à la pression exercée par les Etats- Unis, les conclusions de la conférence de l’Unodc des Nations Unies (Office on Drugs and Crime) qui s’est tenue à Vienne en avril, mettent en évidence une sorte de « complicité » dans cet état de fait, ayant mis l’accent sur des directives prohibitives telles que l’invite à la création d’un « ceinture de sécurité » autour de l’Afghanistan plutôt que sur des normes sanitaires et sur la contention des dégâts, et considérant comme marginale l’imminence d’une tragédie européenne.

En Afghanistan, les commandements militaires américains auraient communiqué à tous les contingents occidentaux présents dans le pays, des directives de « négligence bienveillante » face à la culture du pavot. Il s’agit de fermer un œil, ou plutôt les deux, pour s’assurer la non belligérance des seigneurs de la guerre qui opèrent dans les régions du « printemps rose », maintenant de cette façon perverse et sans rien débourser, les promesses d’aides à la reconstruction du pays pour des milliards de dollars, promesses encore non maintenues….

Rien de nouveau dans ce genre « d’aide » de la part des Etats-Unis. De 1965 à 1975 la CIA se mobilisa pour protéger et favoriser la culture du pavot au Laos et pour financier ainsi l’armée des mercenaires qui, conduite par le général Vang Po, essaya en vain d’interrompre la piste Ho Chi Minh. Les services secrets américains allèrent même jusqu’à mettre sur pied une véritable compagnie de transport aérien, du nom de « Air America », qui durant toutes ces années transféra des milliers de tonnes de pâte d’opium du Laos en Birmanie et dans d’autres pays asiatiques (Voir le film homonyme avec Mel Gibson)

Jusqu’à présent personne ne pense vraiment qu’une telle « exportation protégée » est sur le point de renaître, mais ce qui est sûr c’est que cette situation a rallumé la compétition entres les différentes mafia européennes, comme la mafia italienne et la mafia russo-albanaise qui ne tardera pas à avoir la primeur grâce à l’élargissement de l’Union européenne aux ex pays de l’Est, cette dernière ayant vu s’ouvrir de larges perspectives vers un marché plus vaste même s’il est mon rentable. Les opérateurs de l’Ouzbékistan et des autres pays de la fédération russe ont commencé dès septembre dernier à battre la campagne afghane, s’assurant les récoltes de 2003 par de substantiels versements anticipés en dollars aux cultivateurs locaux.

(Sources www.luciomanisco.com : Lucio Manisco est député au Parlement Européen )

Heureusement que les Américains appellent cette façon d’agir « Enduring freedom »… Je peux faire semblant de ne pas comprendre…  Autrement, je ne sais pas si j'arriverais à la suporter...